Commission d'accès aux documents administratifs
Le Président
Avis n° 20247525 du 26 novembre 2024
Monsieur Guillaume BRICKER, pour la « Fédération des Associations de Protection de la Vallée de la Seine du Sud Seine et Marnais (FAPVS 77) », a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 25 octobre 2024, à la suite du refus opposé par le maire d'Avon à sa demande de communication du plan de gestion de la pollution du Val du Moulin, résultant de la réunion du 24 novembre 2023 organisée par la commune, et en cas d'absence de documents formalisés, des informations que celui-ci comporte.
En l’absence d'observations formulées par le maire d'Avon, la commission rappelle que l'article L124-2 du code de l'environnement qualifie d'informations relatives à l'environnement toutes les informations disponibles, quel qu'en soit le support, qui concernent notamment : « 1° L'état des éléments de l'environnement, notamment l'air, l'atmosphère, l'eau, le sol, les terres, les paysages, les sites naturels, les zones côtières ou marines et la diversité biologique, ainsi que les interactions entre ces éléments ; / 2° Les décisions, les activités et les facteurs, notamment les substances, l'énergie, le bruit, les rayonnements, les déchets, les émissions, les déversements et autres rejets, susceptibles d'avoir des incidences sur l'état des éléments visés au 1°, ainsi que les décisions et les activités destinées à protéger ces éléments ; / 3° L'état de la santé humaine, la sécurité et les conditions de vie des personnes, les constructions et le patrimoine culturel, dans la mesure où ils sont ou peuvent être altérés par des éléments de l'environnement, des décisions, des activités ou des facteurs mentionnés ci-dessus ; (...) ».
En l'espèce, la commission relève que la présente demande porte sur la communication d'un plan de gestion de la pollution, qui est un outil permettant d'établir des différents stratégies de réhabilitation ou de dépollution à appliquer sur un lieu pollué.
La commission estime par conséquent que la demande porte sur l'état des éléments de l'environnement, ainsi que sur les décisions, activités et facteurs susceptibles d'avoir des incidences sur ceux-ci, au sens du 1° et du 2° de l'article L124-2 précité. La commission en déduit que le document ou les informations demandés sont constitutifs d'informations relatives à l'environnement au sens de ces dispositions. Leur communication relève, partant, du régime d'accès prévu par les articles L124-1 et suivants du code de l'environnement. Selon les articles L124-1 et L124-3 du code de l’environnement, le droit de toute personne d'accéder à des informations relatives à l’environnement, lorsqu'elles sont détenues, reçues ou établies par les autorités publiques ou pour leur compte, s'exerce dans les conditions définies par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve des dispositions du chapitre IV du titre II du livre Ier du code de l'environnement. La commission souligne que le régime particulier prévu par le chapitre IV du titre II du livre Ier du code de l’environnement porte, à la différence du régime général d'accès aux documents administratifs, sur les informations et non uniquement sur les documents relatifs à l’environnement.
Elle en déduit que dès lors que l’administration détient de telles informations, figurant ou non sur un document existant, elles sont communicables à toute personne qui en fait la demande en application de l’article L124-3 de ce code, ce dernier n’imposant aucune exigence de formalisation préalable de l'information demandée, et qu’il appartient alors à l’administration, saisie d’une demande en ce sens, d’élaborer un document comportant les informations sollicitées.
Les articles L124-4 et L124-5 de ce code précisent les cas dans lesquels l'autorité administrative peut rejeter une demande d'information relative à l'environnement, au nombre desquels ne figure pas le caractère préparatoire du document ou des informations, à condition que le document sollicité soit lui-même achevé (avis n° 20054612 du 24 novembre 2005 et n° 20060930 du 16 mars 2006). Ces informations sont, en application des dispositions de l'article L124-4 du code de l'environnement, communicables à toute personne qui en fait la demande, sous réserve, le cas échéant, de l'occultation préalable des éventuelles mentions relatives aux intérêts mentionnés aux articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, à l'exception de ceux visés au e) et au h) du 2° de l'article L311-5. Au nombre de ces secrets protégés figurent notamment le secret des affaires et le secret de la vie privée.
La commission souligne en outre qu'en vertu des dispositions du II de l'article L124-5 du code de l'environnement, interprétées conformément aux dispositions de la directive n° 2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil concernant l'accès du public à l'information en matière d'environnement du 28 janvier 2003 (avis de partie II n° 20090271 du 29 janvier 2009), l'autorité publique ne peut rejeter une demande portant sur une information relative à des émissions de substances dans l'environnement, telles que les émissions sonores, infrasonores, aquatiques ou lumineuses, que dans le cas où sa communication porterait atteinte à la conduite de la politique extérieure de la France, à la sécurité publique ou à la défense nationale, ou encore au déroulement des procédures juridictionnelles, à la recherche d'infractions pouvant donner lieu à des sanctions pénales ou, enfin, à des droits de propriété intellectuelle. Ces dispositions font en revanche obstacle à ce que l'autorité administrative en refuse la communication au motif qu'elle comporterait des mentions couvertes par le secret des affaires ou le secret de la vie privée. Pour ce qui concerne la notion d'émissions dans l'environnement, par deux arrêts C-673/13 et C-442/14 du 23 novembre 2016, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a jugé que, pour l'application de la directive du 28 janvier 2003 précitée, il y avait lieu d'interpréter ces dispositions à l'aune de sa finalité, qui est de garantir le droit d’accès aux informations concernant des facteurs, tels que les émissions, qui ont ou sont susceptibles d’avoir des incidences sur les éléments de l’environnement, notamment sur l’air, l’eau et le sol et de permettre au public de vérifier si les émissions, rejets ou déversements ont été correctement évalués et de raisonnablement comprendre la manière dont l’environnement risque d’être affecté par lesdites émissions. Cette notion vise ainsi les informations qui « ont trait à des émissions dans l’environnement », c’est-à-dire celles qui concernent ou qui sont relatives à de telles émissions, et non les informations présentant un lien, même direct, avec les émissions dans l’environnement. Par son arrêt C-442/14 du 23 novembre 2016, la CJUE a précisé que les indications concernant la nature, la composition, la quantité, la date et le lieu effectif ou prévisible, des émissions dans l'environnement ainsi que les données relatives aux incidences, à plus ou moins long terme, de ces émissions sur l'environnement, en particulier les informations relatives aux résidus présents dans l'environnement après l'application du produit en cause et les études portant sur le mesurage de la dérive de la substance lors de cette application, que ces données soient issues d'études réalisées en tout ou partie sur le terrain, d'études en laboratoire ou d'études de translocation, relèvent de cette même notion.
La commission souligne, enfin, qu’en matière d'informations environnementales, même en présence d’un motif légal de refus, il appartient à l’autorité publique d’apprécier au cas par cas si la préservation des intérêts ou secrets protégés serait de nature à faire obstacle à la communication des informations concernées, compte tenu de l’intérêt public que leur divulgation servirait.
En application de ces principes, la commission estime que le document ou les informations demandés sont communicables à toute personne en faisant la demande, en application des articles L311-1 du code des relations entre le public et l’administration et L124-1 et suivants du code de l'environnement, sous réserve, dans les conditions rappelées ci-dessus, selon la catégorie à laquelle l'information environnementale concernée se rattache, le cas échéant, des occultations nécessaires à la protection des intérêts énumérés aux articles L124-4 et L124-5 de ce dernier code, et dont l'intérêt pour l'environnement ne justifie pas qu'il soit dérogé à ces secrets.
La commission émet, dès lors, un avis favorable à la présente demande, sous cette réserve.
Le présent avis est rendu au nom de la commission, par délégation donnée à son président en vertu des articles L341-1 et R341-5-1 du code des relations entre le public et l'administration.
Bruno LASSERRE
Président de la CADA